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"Sit
down, look and you will see that your thoughts come into you
from outside, but before they enter fling them back"
Il
fallait qu'il repousse toute pensée qui faisait intrusion sur
cet écran de cinéma. "Pour
vous qui êtes poète, ça ne devrait pas être dur"
lui dit Lele.
Aurobindo n'avait jamais pensé que l'on puisse avoir une
action sur les pensées, mais comme à son habitude, il obéit
sans discuter.
Au
bout de trois jours, ou plutôt, au bout d'une journée, sa tête
était devenue vide comme de l'air, plus aucune pensée n'y
entrait. Cette rupture du mental était définitive. Sri
Aurobindo avait atteint le silence de l'esprit.
Signe
de nouveau du destin, un évènement terrible guettait
Aurobindo, et éclatait, quand deux jeunes bengalis
mirent une bombe dans la voiture du magistrat Kingsford.
L'attentat sitôt perpétré, la police débarqua au
"Manicktola garden" la propriété
d'Aurobindo, là où ses mi-litants s'entraînaient
militairement, et arrêtèrent Aurobindo, le 4 mai 1908
comme le responsable présumé de l'attentat.
Il
fera douloureusement une année pleine de prison à
Alipore, tandis que son frère Barin sera déporté aux
terribles îles Andaman.
Si
la déportation fut douloureuse, comme il s'en expliquera plus
tard dans une revue en bengali qu'il créa, cette expérience
fut pour lui décisive.
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C'est
là, pendant cette année en prison, qu'il réalisera complètement
l'identité au transcendant - il devint un dieu vivant.
Au
terme d'une année d'instruction, il fut acquitté de toutes
les charges qui pesaient contre lui. Nous retiendrons les
paroles prophétiques de son avocat C.R. DAS:
"Voici
mon appel à vous, longtemps après que cette controverse sera
prise par le silence, longtemps après ce tourment et cette
agitation, longtemps après qu'il soit mort et enterré, il
restera éternellement comme le poète du patriotisme, le
prophète du nationalisme, et l'amoureux de l'humanité.
Longtemps
après qu'il soit mort et enterré, ses paroles se perpétueront,
encore et encore, pas seulement en Inde, mais par delà les
mers, et les terres. Donc, j'affirme que l'homme dans sa
position ne se tient pas seulement debout devant la barre
d'une court de justice, mais devant la haute cour de
l'histoire."
Aurobindo
quittera la prison d'Alipore le 5 mai 1909, un an pile après
son arrestation.
Voilà
comment en totale réclusion d'une année, l'athée, le
sceptique, l'agnostique que devint la divinité.
L'Aurobindo
d'après la prison était devenu un autre homme.
Le
politicien gauchiste extrémiste, le leader populaire a
compris que la lutte politique ne sauverait pas le pays, mais
anéantirait un problème pour en créer un autre, et que
seule la lutte sur le terrain mystique pouvait être vraiment
efficace durablement.
C'est
dans cette optique qu'il crééra deux nouveaux hebdomadaires,
"Karmayogin", en Anglais, et "Dharma", en
Bengali".
Mais
le gouvernement britannique avait identifié son véritable
ennemi, ce qui fera dire à lord Minto: "Je peux
seulement répéter que cet homme est le plus dangereux
adversaire auquel nous ayons affaire."
Un
jour, assis dans les locaux de son journal "Karmayogin",
il apprend par la bande, les bruits sur sa future nouvelle
arrestation. Restant calme et sans agitation comme à son
habitude, il entendit très distinctement une voix lui dire:
"Go to Chandernagore!, Va-t-en à Chandernagor!"
Sans
discuter une seconde, il prit le peu d'affaires qu'il
possédait, et s'en alla à Chandernagore, à l'époque
possession française.
De
là, il entendit de nouveau la même voix lui dire d'aller à
Pondichéry.
Aurobindo
dira plus tard: "I could not question. It was Sri
Krishna's adesh. I had to obey. Later I found it was for the
Ashram. for the yogic work."
"Je
ne pouvais pas douter. c'était un impératif de Krishna. Je
devais obéir. Je compris plus tard que c'était pour
l'Ashram. Pour le travail du Yoga."
Le
4 avril 1910, il arriva à Pondichéry, il avait 38
ans.
Ayant
renoncé à la lutte politique sans support mystique,
il se retrouva avec quelques rares fidèles, 5 au
total, qui le
suivirent dans ses pérégrinations.
Il
comprit enfin qu'il était venu sur terre pour
accomplir la descente complète de la cons-cience de
Brahman, le transcendant absolu.
Il
s'en ouvrira à sa femme dans une lettre restée également
célèbre, "les trois folies", dans laquelle il
développe ses vues futures. Mrinalini viendra à plusieurs
reprise à Pondichéry, mais le 17 décembre 1918, elle
décèdera à Calcutta.
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La
situation d'Aurobindo et de ses compagnons à Pondichéry
était plus que précaire, ils vivaient entièrement d'aumône
et de donations, ce qui ne rendait pas la vie de tous les
jours facile. Pourtant, son développement se poursuivait, il
savait que la réalisation atteinte n'était qu'une étape,
il lui fallait aller plus loin que d'autres dans un passé
récent, retrouver le plan de conscience atteint jadis par les
Rishis, les visionnaires de la légende, les dieux vivants du
passé, atteindre la source, la Gnose et l'incarner, afin de
la faire descendre ici bas, à la portée de tous.
Il
dira que tous les prophètes du passé ont échoué dans leur
volonté de transformer le monde, ce qu'ils ont réussi pour
eux, ils n'ont pas pu le rendre universel.
Mais
lui aussi échouera! on
le verra comment.
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